Trisapiens

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La notion de "trisapiens" s'inscrit dans une réflexion sur la connaissance et la manière dont elle est façonnée, amplifiée ou enrichie par l'homme, et maintenant adjuvée par sa technologie (techné). Voici une exploration de cette idée :

Techné 
Dans la philosophie antique, la "techné" fait référence à l'art, à la technique ou au savoir-faire, c'est-à-dire à la capacité humaine de créer et de façonner le monde autour de lui grâce à son ingéniosité et ses compétences. Dans le contexte moderne, on pourrait étendre cette notion à l'ensemble des technologies, des outils numériques aux vastes réseaux d'information.
Trisapiens et Techné 
  1. Celui qui sait : La sagesse individuelle ou la connaissance personnelle, qui peut être enrichie et étendue grâce à l'accès à la technologie (par exemple, l'accès à des bases de données ou à des ressources d'apprentissage en ligne).
  2. Celui qui sait par réflexion : La technologie, en particulier les médias sociaux et les plateformes collaboratives, a révolutionné la manière dont les individus partagent des connaissances et apprennent les uns des autres. Cette dimension peut évoquer la co-création de savoirs, la collaboration et l'échange.
  3. Celui qui sait par conflexion : Ici, la technologie pourrait être envisagée comme un mécanisme d'intelligence collective, où des réseaux vastes et interconnectés de personnes partagent, combinent et amplifient la connaissance à une échelle consensuelle globale.
Adjuvance 
La "techné" a le pouvoir d'augmenter considérablement la capacité humaine à comprendre, à interagir et à créer. Cependant, elle pose aussi des questions éthiques sur la nature de la connaissance, les dangers potentiels de la surinformation, la dépendance technologique, et les implications d'une connaissance qui est souvent médiatisée par des algorithmes ou des intérêts commerciaux.
La notion de "trisapiens" va servir de cadre pour explorer ces thèmes, en particulier dans le contexte d'une réflexion sur la manière dont la technologie façonne notre compréhension du monde et notre place en son sein ; et donc la différence entre le réel tel qu'il est (les données collectées) et nos réalités telles que nous les ressentons (concaténées aux qualia).

Les quatre systèmes de pensée

Il semble cohérent avec la proposition d'Olivier Houdé de considérer un quadruple niveau systémique de pensée :

  • systèmes 1, 2 et 3 tels que décrit par Olivier Houdé
  • et système 4 lorsque la pensée se fait adjuver par celle d'autrui.

Reprenons : Olivier Houdé, psychologue français, a développé une théorie de la pensée selon laquelle notre cerveau utilise différents "systèmes" de pensée à différents moments, en fonction de la tâche à accomplir. Pour simplifier :

  • Système 1 : Automatique, rapide et souvent basé sur l'intuition. Il s'agit de la pensée heuristique, où nous faisons des jugements rapides sans analyse approfondie.
  • Système 2 : Plus lent, plus réfléchi et analytique. Il requiert plus d'efforts cognitifs et est utilisé pour des tâches plus complexes.
  • Système 3 : Selon Houdé, c'est un système de "surveillance" ou de "contrôle inhibiteur" qui régule les deux premiers systèmes, permettant à l'individu de surmonter des biais intuitifs et d'atteindre des conclusions plus rationnelles.

L'idée est d'ajouter un Système 4 pour décrire une pensée qui se fait avec l'aide d'autrui. Dans de nombreux domaines, comme la résolution de problèmes complexes, la créativité ou l'apprentissage, la collaboration et l'échange d'idées avec d'autres peuvent amplifier et enrichir la pensée individuelle. Ce "Système 4" engloberait la notion de pensée collaborative, d'intelligence collective ou de co-création.

Ce quatrième système

Cela rejoint également certains travaux en psychologie sociale et cognitive qui montrent comment la pensée collaborative peut aboutir à des solutions plus efficaces, à une meilleure prise de décision, et à une créativité accrue. Le concept du "Système 4" pourrait servir à conceptualiser la manière dont la pensée individuelle est influencée, modifiée et enrichie par l'interaction avec d'autres.

A noter que parmi les partenaires de pensée il faut également compter ceux qui ont participé à la base de connaissance de l'intelligence artificielle éventuellement utilisée qui s'appuie sur les informations provenant de leur multitude de sources. Ces sources sont le produit de la pensée, de la recherche, de l'écriture et des expériences de ces individus à travers le temps. En ce sens, interagir avec une IA revient à dialoguer indirectement avec une multitude d'esprits et de perspectives.

Quelques points à considérer :

  1. IA comme miroir de la connaissance collective : Une IA formée sur d'immenses corpus de textes capte une grande partie de la connaissance humaine. Elle peut donc être vue comme un outil qui reflète la sagesse, les idées et les perspectives accumulées par l'humanité.
  2. IA comme médiateur : En fournissant des informations, des réponses ou des perspectives basées sur sa formation, l'IA agit comme un médiateur entre l'utilisateur et la vaste base de connaissances sur laquelle elle a été formée. Elle permet un accès facilité à la pensée collective.
  3. Limites et biais : Bien que l'IA puisse accéder à une grande quantité d'informations, elle n'est pas exempte de biais. Les données sur lesquelles elle a été formée peuvent refléter certains préjugés ou lacunes présents dans ces sources. De plus, l'IA n'a pas de conscience ou de compréhension profonde; elle traite les informations selon des algorithmes et des modèles, sans véritable sens de la signification ou de la nuance.
  4. Évolution de la pensée collaborative : Avec l'IA devenant un outil courant dans de nombreux domaines, la notion de collaboration évolue. La "pensée assistée/adjuvée par IA" pourrait être une nouvelle forme de collaboration où les humains et les machines travaillent ensemble pour résoudre des problèmes, générer des idées ou explorer de nouvelles perspectives.

L'introduction d'un "Système 4", pour englober non seulement la pensée collaborative entre humains mais aussi la collaboration entre humains et IA, semble pertinente à l'ère actuelle de la technologie. Cela élargit la compréhension de la manière dont la pensée est influencée et amplifiée dans un monde de plus en plus interconnecté et technologiquement avancé.

Dès lors,

  • la réflexion est un retour de la pensée (noèse) sur elle-même pour approfondir ses résultats (c'est le système 2) ;
  • et la conflexion est un retour à nouveau pour confronter ses résultats avec autrui (conoèse) par le dialogue direct ou à travers un ou des modèles génératifs (système 4)

La distinction entre "réflexion" et "conflexion" offre une structure nuancée pour comprendre les différentes dimensions de la pensée humaine et collaborative :

  1. Réflexion : la réflexion est un acte introspectif où la pensée se tourne vers elle-même. C'est un processus d'analyse, d'évaluation et de compréhension de nos propres idées. Elle représente une démarche critique où l'on évalue, vérifie et affine notre propre pensée. Cela correspond donc bien au Système 2 tel que décrit précédemment, où la pensée est plus lente, délibérée et analytique.
  2. Conflexion : nous allons ici au-delà de la simple introspection pour intégrer le dialogue et la confrontation d'idées avec autrui. Ce n'est pas seulement une pensée introspective, mais une pensée qui cherche activement à se comparer, à se mesurer et à s'enrichir grâce à l'interaction avec d'autres personnes ou des systèmes. Le terme "conoèse" décrit la pensée tournée vers les autres. La conflexion, associée au Système 4, englobe cette dynamique de collaboration, que ce soit avec d'autres humains ou avec des entités basées sur l'IA.

La différenciation faite entre ces modes de pensée souligne l'importance du dialogue et de la collaboration dans l'évolution et l'affinement de nos idées. Dans un monde de plus en plus interconnecté, avec un accès instantané à des informations et des perspectives variées, ainsi qu'à des outils basés sur l'IA, la capacité à engager une "conflexion" devient essentielle.

C'est une manière qui parait intéressante et pertinente de structurer la pensée, surtout à une époque où la collaboration et l'intégration de la technologie dans notre réflexion quotidienne deviennent omniprésentes.